En droit, les officiers et agents de police sont obligés de recevoir les dépôts de plainte.
En effet, l’article 15-3, alinéa 1er, du code de procédure pénale dispose clairement que :
« Les officiers et agents de police judiciaire sont tenus de recevoir les plaintes déposées par les victimes d’infractions à la loi pénale, y compris lorsque ces plaintes sont déposées dans un service ou une unité de police judiciaire territorialement incompétents. Dans ce cas, la plainte est, s’il y a lieu, transmise au service ou à l’unité territorialement compétents ».
Il y a donc une obligation légale de recevoir les plaintes.
Cette obligation est également affirmée dans la charte d’accueil du public et d’assistance aux victimes qui est en principe affichée dans les locaux de police et de gendarmerie : « Les services de police nationale et de la gendarmerie nationale sont tenus de recevoir les plaintes déposées par les victimes d’infractions pénales, quel que soit le lieu de commission ». La déontologie de ces corps leur impose en outre de recevoir les plaintes : « la première obligation du policier ou du gendarme est de prendre les plaintes en vertu de l’article 15-3 du code de procédure pénale. Dans l’hypothèse où le fait dénoncé ne constitue pas une infraction pénale, la victime doit être orientée vers d’autres administrations ou structures idoines ».
Ainsi, les services de police et de gendarmerie sont dans l’obligation de recevoir les plaintes, quel que soit le lieu de l’infraction et quel que soit le lieu de résidence de l’auteur de la plainte. En outre, ils ne peuvent refuser de recevoir une plainte au motif qu’il n’y aurait aucun élément de preuve, sauf à ce que la plainte vise un comportement ne constituant manifestement pas une infraction (Décision du Défenseur des droits du 26 mars 2013). En effet, il est de la seule compétence du Procureur de la République de qualifier une infraction et de décider de l’opportunité d’instruire une plainte.
Cependant, en pratique, il arrive que certains services refusent de recevoir une plainte. On parle alors de manquement au devoir d’assistance de ces services. La victime d’un tel manquement dispose de recours pour faire valoir ses droits.
La première voie de recours est de saisir la Défenseure des Droits. En effet, l’article 4 de la loi organique n°2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits dispose que la Défenseure des Droits est chargée :
« 1° De défendre les droits et libertés dans le cadre des relations avec les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics et les organismes investis d’une mission de service public ;
[…]
4° De veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République ».
La Défenseure des Droits dispose de pouvoir d’investigation importants permettant de demander des informations aux administrations ou agents les composant, d’effectuer elle-même des vérifications dans les services concernés par le litige et, lorsque les faits signalés sont susceptibles de revêtir une qualification pénale, elle doit saisir le procureur de la République. En outre, dans le cas spécifique d’un refus d’enregistrement d’une plainte, il peut saisir lui-même l’autorité chargée d’engager les poursuites disciplinaires.
La deuxième voie de recours est fonction de l’administration concernée et se fait au travers de ses inspections générales de contrôle internes des activités de ses services. A cet effet, il est mis à disposition des victimes un formulaire de signalement à remplir afin de saisir l’inspection générale de la Police Nationale (IGPN) ou l’inspection générale de la Gendarmerie Nationale (IGGN).
Cependant, il ne faut pas abuser de cette procédure, une dénonciation mensongère peut se retourner contre la victime et aboutir au dépôt d’une plainte de la part du ministre de l’Intérieur.
Enfin, il est possible de saisir directement le Procureur de la République par lettre simple.
Antoine Fouret
Avocat au Barreau de Paris
Un avis sur « Le refus de dépôt de plainte par les services de police »