Instruction en famille : suspension d’un refus d’autorisation Motif 1

Il y a quelques jours, le tribunal administratif de Rennes a rendu une ordonnance dans laquelle le juge continue de définir précisément les contours de l’appréciation qu’a la jurisprudence du motif 1, laquelle sera bien utile pour les familles concernées.

Il a fait droit à l’argumentation de la famille qui soutenait que la scolarisation de l’enfant, handicapé à un taux compris entre 50 et 80%, était moins conforme à l’intérêt de l’enfant. La force de ce dossier reposait notamment sur l’historique de scolarisation qui témoignait d’une forte dégradation de l’intérêt scolaire pour l’enfant, en sus de sa situation médicale.

Pour ce faire, le juge s’est fondé sur la dégradation des capacités attentionnelles de l’enfant, l’absence de progression réelle au sein de l’institution scolaire et la survenance accrue de troubles attentionnels de l’enfant. Il a également retenu l‘aveu d’impuissance et d’inadaptation de l’institution, laquelle souhaitait mettre en oeuvre des procédures disciplinaires en guise d’accompagnement des troubles de l’enfant et le fort absentéisme de l’enfant pour raison médicale pendant sa scolarisation.

C’est donc une décision favorable qui a été rendue au profit de cet enfant, désormais autorisé à être instruit en famille, bien que son dossier était extrêmement lourd et composés de nombreux troubles démontrant que la scolarisation ne convenait pas à sa situation, de telle sorte qu’une autre décision eût été surprenante.

Extraits :

« Il résulte de l’instruction que B, reconnu par la maison départementale des personnes handicapées de Charente-Maritime comme atteint d’un handicap évalué entre 50 et 80 %, souffre de troubles sévères du spectre autistique se manifestant par une difficulté dans ses apprentissages, des difficultés de concentration et d’autonomie, associés à des difficultés comportementales, des troubles alimentaires et des troubles de l’acuité visuelle. S’il a pu, jusqu’en classe de 6ème, progresser dans ses apprentissages avec la présence d’un accompagnement humain à ses côtés et un aménagement de son temps de présence, cette scolarisation est devenue plus difficile voire problématique depuis son entrée en classe de 5ème, ce dernier présentant des troubles du comportement accrus en présence de tierces personnes et ne se montrant plus disponible pour les apprentissages. Le guide d’évaluation des besoins de compensation en matière de scolarisation (Gevasco) établi en octobre 2022 conclut que son comportement n’était plus acceptable dans le cadre scolaire malgré l’accompagnement humain important dont il bénéficiait et l’établissement envisageant même des sanctions, dont une exclusion temporaire, en cas de débordement important. Par ailleurs, il est constant que B n’a pu en réalité être scolarisé qu’une quinzaine de jours depuis le 3 janvier 2023, les deux médecins généralistes qui l’ont suivi ayant pour le premier prescrit des arrêts scolaires, pour le second attesté de ce qu’une scolarisation classique était incompatible avec son état de santé. Dans ces conditions, Mme C justifie de ce que la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à la situation de son fils. La condition d’urgence visée à l’article L. 521-1 du code justice administrative est, dès lors, remplie. 

[…] Pour la mise en œuvre de ces dispositions [L. 131-5, 1° du code de l’éducation], dont il résulte que les enfants soumis à l’obligation scolaire sont, en principe, instruits dans un établissement d’enseignement public ou privé, il appartient à l’autorité administrative, lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à ce que l’instruction d’un enfant dans la famille soit, à titre dérogatoire, autorisée, de rechercher, au vu de la situation de cet enfant, quels sont les avantages et les inconvénients pour lui de son instruction, d’une part dans un établissement d’enseignement, d’autre part, dans la famille selon les modalités exposées par la demande et, à l’issue de cet examen, de retenir la forme d’instruction la plus conforme à son intérêt.

9. En l’état de l’instruction, eu égard aux éléments circonstanciés attestant des difficultés rencontrées par B dans le cadre de sa scolarité malgré les aides qui ont pu être mises en œuvre, le moyen tiré de ce que la commission académique du rectorat de l’académie de Rennes a commis une erreur d’appréciation est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige » (TA Rennes, Ord., 8 janvier 2024, n° 2306937).

Publié par La Norville Avocat

Cabinet d'avocat intervenant particulièrement en droit public (droit de l'éducation, droit administratif, police administrative) et en droit privé pour les problématiques liées au logement (AIRBnB,baux, bruit, voisinage).

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